Citation : " (...)Viennent ensuite les nourrices (images de la terre nourricière), assises dans un fauteuil d'osier et allaitant  un ou deux enfants. Ce "lien du lait" est unique dans l'Occident romain, et typiquement gaulois." 

Maurice Franc "Les figurines de terre blanche de l'Allier" Bulletin de la Société d'Emulation du Bourbonnais, 1er trimestre 1990

COXON

Texte : Coxon

 

La Vénus Protectrice cassée

 

Venus protectrice photo dominique boutonnet

 

 

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Que de monde aujourd’hui ! Les enfants étaient très intéressés par l'histoire des œuvres d'art.

Ce soir-là, c'était avec un mauvais pressentiment que José fermait le musée Anne de Beaujeu. II passa beaucoup plus de temps qu'il ne le faisait d'habitude à tout vérifier et à brancher les alarmes. De nombreuses personnes venaient visiter ce musée qui contenait des trésors. Il aimait beaucoup son travail de surveillant et de guide. Il connaissait toutes les histoires des statuettes. Sa préférée était la Vénus protectrice.

En arrivant à son travail le lendemain, il constata avec désolation que son pressentiment était bien fondé. Le musée avait été cambriolé dans la nuit. Les plus belles statues et les pièces de grande valeur avaient été dérobées. Les cambrioleurs n'avaient eu que peu de temps avant l'arrivée de la police, mais José comprit très vite qu'ils connaissaient le musée. La Vénus protectrice faisait partie des richesses volées, à son grand désespoir. Le jour même, alors qu'il était effondré, la police assommait José de questions comme s'il était coupable.

Quinze jours après il fut convoqué à nouveau au commissariat. Toutes ses affirmations avaient été vérifiées : son heure de départ du musée, l'heure de ses courses au supermarché du coin. Sa voisine avait confirmé son heure de retour chez lui et mentionné qu'il n'était pas ressorti.

Petit à petit, José se remettait du cambriolage. L'été suivant, comme tous les ans, il partait en vacances chez son ami Clément à Paris. Tous les deux adoraient chiner sur les brocantes à la recherche de l'objet rare. Ils allèrent un jour aux puces de Saint Ouen. José eut un malaise lorsqu'il reconnut sur un stand deux des figurines dérobées du musée. Il s'approcha et vit que la Venus protectrice était cassée. Il manquait un des cinq enfants. Malgré cela il acheta les deux statuettes sans discuter du prix tellement il était heureux.

- Vous n'avez pas le morceau manquant ? demanda-t-il à la jeune vendeuse.

- Non.

Il donna sa carte à la jeune femme en lui demandant de l'appeler si elle le retrouvait.

- Elle ne te rappellera jamais, lui lança Clément.

De retour chez Clément, très fier de ses achats, José appela son patron pour lui annoncer la bonne nouvelle. Il fut surpris devant le manque d'enthousiasme de son employeur et comprit pourquoi très vite. Ce dernier connaissait l'adresse du lieu de vacances de José, il communiqua tous les renseignements à la police.

Le lendemain au lever du jour celle-ci débarqua chez Clément.

- On voudrait voir José Carrey.

- C'est moi.

- On sait que vous êtes en vacances ici, nous voulons voir vos bagages.

Les policiers découvrirent les statuettes dans la valise de José. Sous l'œil éberlué de Clément, ils lui mirent les menottes et l'embarquèrent.

Clément resta pendant une bonne demie heure incapable de réagir.

Il se ressaisit et se rendit à l'hôtel de police de son quartier pour avoir des renseignements sur le sort de son ami. José était en garde à vue ; il devait être présenté au juge qui sûrement déciderait de le mettre en prison. Sa grande erreur avait été de se retrouver en possession des statuettes, donc il était le premier suspect.

Clément rentra chez lui la colère au ventre. Il voulait sortir son ami de cette mauvaise posture car il savait qu'il était innocent.

Il décida d'aller espionner la vendeuse des statuettes.

A la première heure, il la trouva en train d'installer ses marchandises.

Au milieu de la journée, deux hommes vinrent sur le stand, l'un pour compter l'argent de la caisse et l'autre pour installer d'autres objets. A un moment, un des deux hommes se dirigea vers une voiture dont il sortit des cartons. Clément nota vite le numéro d'immatriculation du véhicule. Lorsque les deux hommes montèrent dans leur voiture, Clément grimpa sur sa moto et les suivit. Juste avant Fontainebleau, la voiture prit un tout petit chemin. Clément n'osa pas s'y engager de peur d'être remarqué. Il s'arrêta et pris des photos du lieu.

11 revint sur le marché et attendit que la vendeuse remballe sa marchandise afin de la suivre comme il l'avait fait pour les deux hommes. Juché sur sa moto il faisait le même trajet que la première fois. La jeune femme prit un chemin juste après le premier. Il releva le numéro de la voiture et prit une photo.

De retour chez lui, il appela un ami avocat qui accepta de défendre José.

Le lendemain, Clément alla voir José pour l'informer de ses découvertes. Il le trouva bien triste.

- Je suis sûr que nous tenons les membres d'un réseau de trafic d'œuvres d'art. J'ai beaucoup d'éléments qui prouvent ton innocence.

Clément obtint un sourire de son ami, ce qui signifiait, pour lui, son accord pour continuer ses démarches.

- Je voudrais que tu fasses des recherches sur la Venus protectrice. Heureusement, j'ai pris des photos. Les flics m'ont piqué les deux statuettes.

Voyant que José était toujours aussi passionné d'archéologie, Clément fut rassuré.

- Si tu veux, j'emprunterai des livres dans la bibliothèque qui est à côté de chez moi.

- Super. Mais pourrais-tu regarder sur internet. C'est surtout la Vénus protectrice qui m'intéresse.

Après sa visite à la prison, Clément informa la police de toutes ses découvertes et donna la copie des numéros d'immatriculation des deux voitures. Devant l'indifférence des policiers, il décida de continuer à faire son enquête. Il passa sa soirée devant son ordinateur pour s'informer sur les recherches et les découvertes archéologiques de l'Allier. La figurine que José avait achetée sur les puces symboliserait la protection et la solidarité. Une vieille famille moulinoise en avait fait cadeau à la commune.

Mais le souci principal de Clément était de trouver des éléments pour prouver l'innocence de José. Un de ses anciens condisciples travaillait aux anciens Renseignements Généraux. Il retrouva son numéro de portable et l'appela. Il fut étonné de la rapidité avec laquelle Pierre Bayeux avait décroché.

Après quelques mots d'amitié et de joie de se retrouver, Clément expliquait à Pierre la raison de son appel. Il lui donna tous les renseignements concernant l'affaire de José.

- Bon, je m'occupe de tout ça immédiatement, je ne veux pas que ton ami reste enfermé alors qu'il est innocent.

A sa visite suivante à la prison, Clément trouva José complètement amorphe.

- Oh José, ne baisse pas les bras. On arrive au bout de nos peines. Dans pas longtemps tu vas être libre. On va prouver ton innocence. J'ai aussi des livres sur les statues gallo-romaines.

José répondit par un sourire, ce qui rassura Clément.

Le soir même, Pierre appela Clément pour lui annoncer de bonnes nouvelles.

- J'ai demandé au commissariat de faire une perquisition aux domiciles des propriétaires des deux voitures dont tu as relevé les numéros. Les perquisitions ont lieu demain matin. Les deux maisons sont voisines, paraît-il.

Le lendemain, Clément attendait avec impatience les résultats des deux perquisitions. Vers 19 heures, Pierre, tout excité appela son ami.

- Dans les deux maisons les découvertes ont été tout à fait passionnantes.

- Raconte.

- Dans la première, nous avons trouvé des œuvres d'art volées dans des musées de toute la France, des tableaux de maîtres, mais surtout les statuettes du musée Anne de Beaujeu. Pour couronner le tout, le morceau manquant de la Venus protectrice accuse les propriétaires. Dans la deuxième propriété, des murs très hauts cachaient des champs de cannabis. Tu te rends compte ! Les escrocs ! Bravo à toi, Clément, tu as vraiment aidé la police. Tu peux aller chercher ton ami. Je pense que son patron lui est fort redevable d'excuses.

- Son patron, je vais l'appeler dès que l'on aura raccroché. J'ai toujours su que José était innocent. Je le connais depuis des années, il est incapable de voler quoi que ce soit. En tout cas, il a besoin de reprendre des forces.

C'est un José tout souriant que Clément allait rechercher dans sa prison. La première chose que lui dit José le surprit et lui montra à quel point il était passionné par son métier:

- Ils ont retrouvé le morceau manquant de la Venus protectrice. Tu te rends compte, je suis super content. De plus, on m'a assuré que mon casier judiciaire resterait vierge. L'avocat m'a dit que je pouvais demander des dommages et intérêts assez conséquents. Je voudrais que l'on fête ma libération. Si tu n'avais pas été là, je serais encore en prison. Je t'invite au restaurant.

- Mais non, c'est moi qui t'invite. Avant, on va t'acheter des vêtements neufs. Tu nages dans les tiens.

L'injustice ferait-elle maigrir ?

 

 

FIN

 

 

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